RÉDACTION : KATIE HILL & ASHLEIGH GRIBBON
TRADUCTION : ELISABETH SADOUNI
La maison Balmain incarne un style glamour affirmé grâce auquel les femmes ont confiance en elles. Elle fut fondée en 1945 par Pierre Balmain à l’issue de la Seconde Guerre mondiale, et joua un rôle prépondérant dans la révolution de la mode française. Le premier défilé Balmain se tient en octobre 1945, à savoir deux ans avant le fameux New Look de Christian Dior, et propose des silhouettes ajustées, comme par exemple des jupes corolle cintrées. Dès 1947, Balmain est déjà une maison au rayonnement international grâce à son esprit novateur et libéré. Les codes du style Jolie Madame de Pierre Balmain sont aujourd’hui encore au cœur de l’ADN de la marque, comme en témoignent les vestes de tailleur(devenues signature de la maison) empreintes de la même prestence que celles des modèles des années 40.
Le règne d'Oscar de la Renta
Entre la fin du long règne de Pierre Balmain et aujourd'hui, la marque a été dirigée par pas moins de sept directeurs artistiques. En 1994, Oscar de la Renta, créateur dominicain de renom, insuffle à la maison sa propre vision de l’élégance et séduit par une première collection de haute couture exquise. Bien que splendides, les créations d’Oscar de la Renta offraient une vision relativement conventionnelle de la féminité (bien loin des choix audacieux d’aujourd’hui).
Olivier Rousteing, le prodige de Balmain
En 2011, à tout juste 25 ans, Olivier Rousteing prend la tête de la direction artistique de Balmain. Le dessein du jeune visionnaire ? Insuffler une nouvelle énergie aux créations ayant fait la renommée de la marque enfin d'être en phase avec la femme d'aujourd'hui.
À 18 ans, Olivier Rousteing débute sa carrière en tant que stagiaire chez Roberto Cavalli puis gravit les échelons jusqu'à devenir l’un des protégés du directeur artistique de la marque, Peter Dundas. Olivier Rousteing éprouve une vive reconnaissance envers ce dernier pour lui avoir enseigné l'amour du glamour. « Peter réalisait des costumes pour l’opéra, il cultive donc toujours cette espèce d'aura d’extravagance », explique-t-il.
Rapidement reconnu pour son esprit visionnaire, Rousteing imagine des collections pour Roberto Cavalli qui l’aident à adapter son enclin naturel pour l’avant-gardisme à l’esthétique luxueuse de la marque italienne. Un entre-deux maîtrisé que l'on retrouve aujourd'hui encore chez Balmain.
Printemps-été 2012 : la première collection d’Olivier Rousteing pour Balmain lui vaut des louanges immédiates de la part des critiques de l'époque. Ces derniers émettront quand même des réserves quant à son utilisation outrancière des motifs, qui pourraient facilement précipiter les collections de la maison dans le ravin de la vulgarité ; le jeune créateur décrit d'ailleurs sa collection comme ayant « quelque chose de mexicain, entre costumes de matador et papier-peint de Las Vegas. »
Toutefois, Rousteing a également su se restreindre : « Je voulais respecter la tradition haute couture de Balmain et l'influence qu'a eu Oscar de la Renta sur l'identité de la maison. » Ce fut chose faite en apposant ses imprimés excentriques sur les grands classiques de la marque. Rousteing s’est également focalisé sur le streetwear, en lançant la ligne Pierre Balmain et en mettant son regard avant-gardiste au service d'une mode moins guidée.
Dans un court-métrage documentaire étonnant paru en 2019, réalisé et produit par Anissa Bonnefont et judicieusement intitulé Wonder Boy, Olivier Rousteing occupe le devant de la scène et se met en quête de ses racines. « Il existe des tas de documentaires où des designers parlent de mode assis à leur bureau ; c'est une des facettes de qui je suis. », explique Rousteing. « Mais il existe aussi une autre facette qui se sent parfois très seule et aimerait connaître ses origines. Ca n'a pas été facile mais je voulais offrir un voyage d’exploration qui serait le plus authentique et spontané possible. Pendant mes recherches, j’ai découvert mes origines éthiopienne et somalienne. J'ai appris que ma mère était très jeune quand elle m’a eu, et que ça n'a pas nécessairement était son choix. 'Peu importe d’où l’on vient, il est possible de découvrir où l'on veut aller', c'est mon message à la fin du film. »
« Je ne fais jamais de plans pour l'avenir ; beaucoup trop de choses peuvent se produire, que ce soit au sein de la société ou dans ma propre vie », poursuit le créateur, « Mais j’ai des rêves. J’espère que dans 10 ans je me réveillerai le matin comme je le fait aujourd’hui, avec le même sourire, la même joie de créer et le même sentiment de liberté. Je sais que ça a l’air niais, mais dans la mode, il est parfois facile de s’oublier et d’essayer de se conformer à un public donné. On nous colle aussi facilement une étiquette dessus. Ce que j’ai appris, c’est qu'être satisfait de soi-même est le plus important. »
débardeur crop à motif monogrammé | bottines Skye à motif monogrammé | robe courte en maille à motif monogrammé | ceinture B-Classic à motif monogrammé
Les muses de Rousteing
À l'occasion du Mois de l’histoire des Noirs en février 2021, Rousteing a collaboré avec FARFETCH et Nataal, une plateforme dédiée à la mode, la musique, la culture et les arts africains pour mettre en lumière les héros et héroïnes noir·es l'ayant influencé, comme Grace Jones, Prince et Beyoncé.
« La force et la témérité de Grace se reflètent dans le fait qu'elle a été l’une des premières artistes féminines dans l'univers de la musique à cultiver une allure floutant les frontières du genre. » note Rousteing. « J'adore le fait qu'elle offre un glamour qui sorte de l'ordinaire. Sa collaboration avec Azzedine Alaïa dans les années 80 m'a marqué ; elle m'a permis d'appréhender le pouvoir que peut avoir une muse sur un designer. »
« Comme Grace Jones, Prince a fusionné les garde-robes masculine et féminine à une époque où les gens portaient un jugement rapide sur ceux qui faisaient des choix non conventionnels », continue-t-il. « Prince n’a jamais cessé de repousser les limites et se fichait de l’opinion des autres. À bien des égards, la fluidité de genre dans la sphère de la mode remonte à l'époque de Prince et à ses looks iconiques. Par exemple, je me souviens des incroyables clichés de Prince par Avedon dans les années 80 et 90. »
« Beyoncé est une véritable icône, une source d'inspiration et, par dessus tout, une très bonne amie… Elle m'a appris tant de choses. » déclare le designer. « Nous avons passé beaucoup de temps ensemble lors du festival de Coachella [Balmain a habillé la chanteuse pour ses performances de l'édition 2018 du festival], et je n'oublierai jamais ces moments en sa compagnie ; j'ai aussi étais rempli de fierté lorsqu'elle a été voté pour Biden en Balmain lors des présidentielles américaines de novembre. Son pouvoir de narration est incroyable. Et en plus de tout cela, c'est une militante admirable, engagée pour des causes importantes. »
haut crop à carreaux vichy | jupe ceinturée à carreaux vichy | sandales Stella 55 mm | sac à main B-Buzz 23
La Balmain army
Le succès actuel de Balmain est le fruit du génie de Rousteing : une vieille maison de mode qui puise sa vitalité dans sa présence sur les réseaux sociaux. Un pari gagnant puisque Balmain est devenue la première marque française à dépasser le million d’abonnés sur Instagram.
Certaines célébrités incontournables, notamment les Kardashian, ont d'ailleurs adopté le fameux hashtag #balmainarmy. « J’ai créé le hashtag #balmainarmy afin de défendre la diversité », explique Olivier Rousteing à propos de la communauté qu'il s'est façonnée en ligne. « J’ai rencontré beaucoup d’obstacles dans ma carrière, et quand j’ai débuté à la tête de Balmain, on m'a fait comprendre que la musique hip-hop, Kim Kardashian ou les réseaux sociaux n'avaient pas leur place dans une maison de luxe française. Donc je me suis : c'est plus qu'une évolution, c'est une révolution. Et pour mener une réviolution, il me fallait une armée. Aujourd'hui, l'armée s’est bien agrandie pour se transformer en Balmain Nation. Nous sommes uni·es par cette communauté et je ne ressens plus le besoin de me battre. »
L’énergie qu’Olivier Rousteing insuffle au monde de la mode s’étend au-delà des réseaux sociaux, et ce grâce à son talent brut et à sa jeunesse relative qui captivent l’attention des médias mondiaux ainsi que d’autres grandes maisons de l'industrie. Des associations d’imprimés audacieuses de la collection printemps-été 2021 aux vestes en fourrure artificielle colour-block de l’automne-hiver 2014, en passant par les tenues cuir sur cuir (sur cuir) de la collection Croisière 2015, Olivier Rousteing n'a de cesse que de repousser constamment les limites et redéfinir les codes de la mode d'aujourd'hui, et de demain.
Aujourd’hui, la marque est toujours une référence incontournable pour ses blazers à double boutinnage et manteaux, sans oublier ses robes courtes et jupes crayon ajustées. Pour la belle saison 2021, Olivier Rousteing a puisé dans les archives de Balmain pour élabrer une collection empreinte d'un grand savoir-faire, de couleurs et de joie. « Monsieur Balmain a fondé la marque juste après la Seconde Guerre mondiale dans le but de donner de la force aux femmes », explique-t-il. « J'avais envie de raviver son idée d’origine de la Jolie Madame en la replaçant dans une perspective contemporaine, pour voir ce que ça pourrait donner. J'ai également relancé son monogramme PB labyrinthique datant des années 70. Après le départ de Monsieur Balmain, la maison s'est comme assoupie jusqu'à ce qu’Oscar de la Renta en prenne la direction artistique dans les années 90. Beaucoup de choses ont été oubliées pendant cette période de latence, et il est de ma responsabilité de revisier l'identité de la marque. »
À en croire les discours des directeurs artistiques précédents et actuel de Balmain, l'essence du style de la maison n'a pas changé au fil du temps : des tenues conçues pour la Jolie Madame. Si des designers de talent ont retravaillé, redéfini et réinterprété ce concept, l’identité de la maison ainsi que son amour du glamour et de la haute couture restent cependant parfaitement intacts. Aujourd’hui, l’incarnation de Balmain par Olivier Rousteing est tout autant dévouée à produire un style avant-gardiste... mais un brin plus sauvage. Engagez-vous dans la Balmain army et découvrez la collection par ici.